Cette rubrique recense des articles et des ouvrages comportant des allusions, dédicaces ou citations liées à Lucie Delarue-Mardrus ou à des problématiques plus larges comme la littérature dite féminine. En bas à droite figure le nom du lecteur ou de la lectrice qui nous en fait part.

N'hésitez pas à nous révéler vos découvertes... 

 

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Mireille Havet, l'enfant terrible d'Emmanuelle Retaillaud-Bajac aux éditions Grasset, 2008. 

 

Cette excellente biographie de la poétesse dadaïste a, outre le mérite d'être bien écrite, mais surtout nous permet de découvrir le Paris lesbien des Années Folles. On y découvre Natalie Clifford-Barney et sa cours... On croise Lucie Delarue-Mardrus et Germaine Castro qui fut un temps la maîtresse de Mireille. 

 

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Eros émerveillé : anthologie de la poésie érotique française. Ce recueil a paru en 2012 dans la collection Poésie/Gallimard, on le doit à Zéno Bianu.
Dans ce florilège de textes qui couvre cinq siècles, on trouve des femmes de lettres...
Des auteures comme Louise Labé, Héliette de Vivonne et son Luth, Marie Nizet, Anna de Noailles ont également exprimé leur désir...
On y croise Renée Vivien, tonitruante avec son Amour borgne, Lucie Delarue-Mardrus avec Enervements et Si tu viens, je prendrai tes lèvres..., Hélène Picard. Les contemporaines ne sont pas oubliées : Catherine Pozzy, Claudine Bertrand, Sylvie Fabre G.
Bref à découvrir !

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La Révolte d'Eve. Chroniques et autres textes de Marcelle Tinayre. 

Textes réunis par Alain Quella-Villéger et préfacés par France Grenaudier-Klijn. Cette compilation a paru aux Editions des femmes  Antoinette Fouque, 2017.

ISBN : 978-2-7210-0664-6

 

Dynamiquement préfacée par France Grenaudier-Klijn, cette compilation de chroniques et autres textes de Marcelle Tinayre donne envie de redécouvrir cette romancière. Celle-ci fut, en même temps de Lucie Delarue-Mardrus membre du Prix "Vie Heureuse" ; ces deux figures de la littérature féminine se retrouveront encore au club des Belles Perdrix en 1929.

La teneur de leur relation reste encore à définir. Il convient de noter que la carrière de Marcelle Tinayre offre de nombreuses similitudes avec celle de Lucie Delarue-Mardrus. Elles ont toutes deux débuté à La Fronde mais pas dans la même rubrique. Marcelle Tinayre réfléchit sans pour autant s'enflammer sur la condition féminine, évoque l'union libre, les conditions de travail des femmes dans les usines, s'interroge sur le vote des femmes, l'éducation. Elle croque également le portrait de femmes célèbres comme Renée Vivien, Fatma Aliye, Cécile de Tourmay...

Elle fut voyageuse, partant à la découverte de la Turquie, de la Scandinavie...

 

 

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Andrée Viollis. Une femme journaliste par Anne Renoult, Presses universitaires d’Angers, 2004, 205 p. 15, 90 euros.

 

Il s’agit là d’un mémoire récompensé en 2003 par le prix Mnémosyne. Fort bien écrit, cette étude retrace la carrière d’une des premières femmes grand reporter, Andrée Viollis, laquelle débuta sa carrière en signant Une passante dans les colonnes de La Fronde. Elle est, en 1928, une des quatre femmes journalistes de carrière aux côtés de Blanche Turot, Blanche Vogt et Huguette Garnier…  Elle a parcouru les quatre coins du globe et rencontré nombre d’acteurs politiques comme Gandhi.

Andrée Viollis n’est pas une étrangère pour Lucie Delarue-Mardrus. Elle est certainement à l’origine de la rencontre de la romancière avec le peintre Jean-Aman qui se trouve être son beau-frère. Celui-ci donnera un des rares portraits souriants de la princesse Amande… Le nom d’Andrée Viollis voisine avec celui de Lucie Delarue-Mardrus lors de la grande exposition internationale de la Presse à Cologne en 1928 : toutes deux figurent dans l’album des femmes journalistes constitué par l’occasion par Jane Misme. Et ces deux femmes de lettres se retrouveront lors des réunions gastronomiques du club des Belles Perdrix dont toutes deux firent partie…

 

Nelly Sanchez

 

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Paula Dumont, Entre femmes. Trois cent œuvres lesbiennes commentée et résumées, L'Harmattan, 2015.

280 pages, 29 euros.

ISBN : 978-2-343-05470-4

 

Lucie Delarue-Mardrus, en même temps que bon nombre de ses consœurs de lettres, suscite un regain de curiosité grâce au développement des études de genre. La traduction américaine, en 1995, de L'Ange et les pervers par Anna Livia était un signe avant-coureur de cet intérêt nouveau. Ainsi ce titre trouve-t-il une place, avec Nos secrètes amours, parmi les titres que Paul Dumont a recensés pour établir ce panorama de la littérature lesbienne qui débute avec Sappho pour se prolonger en 2014. On y trouve tous les genres littéraires, depuis le roman jusqu'à la bande-dessinée.

Faisant suite à l'avant-propos qui explique la démarche de Paula Dumont, les écrivaines sont classées par ordre alphabétique. L'autrice a eu également l'excellente idée de référencer les biographies consacrées à ces écrivaines homosexuelles ou bisexuelles permettant de mieux découvrir les actrices de cette littérature trop souvent laissée dans l'ombre. Concernant Lucie Delarue-Mardrus, la biographie que lui a consacrée Hélène Plat en 1994, y figure en bonne place. Ma Blonde. Lettres de Lucie Delarue-Mardrus à Natalie Barney, 1902-1942 édité en 2010 est également référencé.

Les littératrices que Lucie Delarue-Mardrus fréquenta dans le salon de Natalie Clifford-Barney ou crois dans le Paris de l'entre-deux-guerres sont également présentes.

 

Nelly Sanchez 

 

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Nous signalons ici quelques poèmes de Lucie Delarue-Mardrus publiés dans différentes revues. Ainsi un long texte, intitulé « D’En haut » et qui est un hommage à Honfleur, a paru dans le premier numéro du Double bouquet. Proses et vers, daté du 15 novembre 1911. La Revue de Paris donne à lire, dans son numéro du 15 octobre 1923 « Henri de Régnier à Honfleur ».

En 1936 cette fois, Lucie Delarue-Mardrus contribue à Visages du Monde qui consacre son numéro du 15 mai au « Cheval » ; sur le même thème et à la même date, Les Cahiers de Haute et de Basse Normandie publient un autre de ses poèmes « Chevauchée ».

 

Claude Bac (août 2011) 

 

 

 

Sonnet de guerre

 

Si Lucie Delarue-Mardrus a volontiers évoqué ses fonctions d’infirmière pendant la Première Guerre mondiale, elle demeure fort distraite quant à sa production littéraire. C’est au hasard que l’on doit la découverte de ses écrits… Ainsi vers 1915, celle-ci sera sollicitée par Mme Michaud-Lapeyre pour participer à un recueil de poésies vendu au profit des Œuvres d’assistance aux Mutilés des Armées de Terre et de Mer. Ce collectif parut en 1916, sous le titre Les Sonnets de la guerre ; il est préfacé par E. Herriot, sénateur du Rhône et maire de Lyon.

Lucie Delarue-Mardrus donna un poème que nous reproduisons ici (p. 33-34, Paris, Emile-Paul Frères, éditeurs). Elle signe aux côtés de plusieurs jurys du Prix Vie Heureuse, comme Mme Julia Daudet, Daniel Lesueur, la Duchesse de Rohan et de membres de l’Académie française. Nous trouvons ainsi Jean Aicard, Henri de Régnier, Edmond Rostand… Cette sollicitation et cet environnement tendent à prouver que Lucie Delarue-Mardrus a conservé tout son prestige…

 

Pour nos blessés

 

Vous qui vous relevez d’entre les trépassés

Pour revivre, joyeux, après des nuits de râles,

Les gloires vous sourient, physiques et morales,

Car vous n’êtes plus vous. Vous êtes les Blessés.

 

La France aujourd’hui songe à ses grands passés.

Personnages présents d’époques magistrales,

O soldats mutilés, frères des cathédrales,

Le pays vous salue et vous dit : « C’est assez ! »

 

Vous avez attendu l’heure réparatrice.

La plaie en guérissant laisse sa cicatrice,

Place de l’héroïque et suprême grief.

 

Désormais vous direz : « J’étais de la tuerie ! »

Et, sur l’ample balafre ou le membre trop bref,

Vos cadets épelleront : « Patrie ».

 

Dr. Nelly Sanchez (août 2011) 

 

 

 

Lucie Delarue-Mardrus fut…

une Belle Perdrix

 

Il est des existences comme de certains tableaux : si une vue générale permet d’apprécier la composition en son ensemble, l’examen des détails se révèle tout aussi intéressant. La vie de Lucie Delarue-Mardrus peut illustrer cette observation dans la mesure où, en écrivant Mes Mémoires (1936), elle a dégagé les lignes de force de sa carrière artistique, sans s’attarder aux anecdotes. Quels faits passa-t-elle sous silence ? Dans cet article, nous nous proposons de revenir sur sa participation, peu connue, au premier club gastronomique féminin : « Le Club des Belles Perdrix ».

Sans que nous sachions encore précisément le rôle qu’elle joua au sein de ce groupe de « gourmettes », ainsi les appelait Curnonsky, cette participation est révélatrice d’une facette de sa personnalité : c’est une Lucie Delarue-Mardrus joyeuse, gourmande et volontiers drôle, que nous découvrons. A la lumière des quelques éléments que nous avons pu rassembler, nous verrons comment s’organisait « Le Club des Belles Perdrix » avant de donner à lire les textes que ces rassemblements mensuels inspirèrent à Lucie Delarue-Mardrus.

 

Ce club fut fondé en janvier 1928, à l’initiative de Maria Croci, romancière et traductrice italienne ; il réunit près de vingt-trois femmes de lettres. Lucie Delarue-Mardrus retrouve certains membres du « Prix Femina » comme Caroline de Broutelles –la secrétaire perpétuelle de ce jury-, Gabrielle Réval et Marcelle Tinayre. Elle aura également pour voisines de table Judith Cladel, la duchesse de Clermont-Tonnerre, Huguette Garnier, Marion Gilbert, Hélène Gosset, Lydie Lacaze, Yvonne Lenoir, Anna Levertin, Rosita Matza, Daffis de Mirecourt, Princesse Murat, Ève et Lucie Paul-Margueritte, Gabriel Réval, Aurore Sand, Ida Snauwart, Hélène Valantin, Andrée Viollis, Blanche Vogt… La fondation de ce club illustre d’abord le regain d’intérêt pour la cuisine traditionnelle française, comme en témoigne, au cours des années vingt, l’apparition d’un très grand nombre de rassemblements. Pour ne citer que les plus importants, L’Académie des Gastronomes fondée en 1928 par Curnonsky, Le Fin Palais, un club d’hommes de robes initié la même année par M. Le Bail, Les Compagnons de Cocagne (M. Guégnan, 1924), et Le Grand Perdreau, club fondé en 1910, réunissant tous les grands noms de la presse et de l’édition françaises. C’est pour faire pendant à ce club illustre, et exclusivement masculin, que le nom de « Belles Perdrix » fut choisi et que ses membres furent recrutés parmi les femmes de lettres. Il faut également y voir une initiative teintée de féminisme puisque celle-ci se veut une réaction contre l’idée selon laquelle « les femmes ne connaissent rien à la véritable cuisine et qu’elles apprécient seulement les plats sucrés et la salade…»[1]. Préjugé qui justifiait l’exclusion des femmes de ce genre de réunions… comme l’explique Maria Croci dans l’interview qu’elle accorde à Gaston Derys –fondateur du club Le Plat unique, en 1927 - « en créant le groupe des Belles Perdrix, vingt femmes de lettres ont voulu prouver qu’elles sont aussi accessibles que les hommes au régal d’art d’une gastronomie raffinée et qu’elles savent manger et boire tout comme leurs compagnons »[2].

Jusqu’en 1930, le club des Belles Perdrix se réunit donc une fois par mois dans un restaurant de la Capitale, « pour déjeuner ou dîner une fois par mois, afin d’apprécier comme il convient la fine cuisine, pour s’instruire plus encore dans l’art de la bonne chère et pour contribuer à la renommée des maisons qui les auront le mieux traitées » (Les Recettes des Belles Perdrix, p. 299). Dans Lectures pour tous, Blanche Vogt précise que « Pour 40 francs –pas davantage- les Belles Perdrix entendent prouver qu’un restaurateur intelligent peut fournir à une clientèle érudite deux plats exquis, une bonne bouteille, un entremets soigné » (BV, Lectures pour tous). Celles-ci se réuniront successivement à l’Auberge du Père-Louis, chez Gady, Au Grand-Veneur… Ces gastronomes se démarquent cependant de leurs homologues masculins par deux initiatives : une fois par an, elles convient un homme, « un perdreau » à leur table… celui-ci ne doit pas être « le mari de son invitée, et […] ne peut pas être invité deux fois de suite »[3]. Les grands de la gastronomie tels que Paul Souday, Curnonsky, René Fauchois seront ainsi invités. Une fois par an, également, elles invitent d’autres femmes de lettres, les « Perdrilettes », pour les initier à la bonne chère. Michelle Deroyer rendra compte de cette expérience dans L’Africain du 18 février 1938. Malgré leur velléité d’émancipation, ces femmes de lettres vont chercher à réactualiser l’image de la femme au fourneau, l’idéal cordon-bleu. Pour ce faire, elles vont rassembler les meilleurs plats goûtés au cours de leurs agapes mensuelles dans Les Recettes des Belles Perdrix. Ce collectif, signé Maria Croci et Gabrielle Réval, parut en 1930 chez Albin Michel. Les Dimanches de la femme du 17 août 1930, présentait ainsi l’ouvrage :

« Le volume contient une série de recettes composées par les « Belles Perdrix » ou recueillies par elles. Chaque recette a été soigneusement essayée, et on peut dire qu’il y en a pour tous les goûts, mais surtout pour les palais raffinés. Elles sont assaisonnées de petites maximes et suivies d’une foule d’anecdotes amusantes. Ce choix exceptionnel de recettes excellentes mérite d’autant plus d’être dans les mains des maîtresses de maison que les femmes de lettres, auxquelles on doit ce livre, Mme Gabrielle Réval et Maria Croci, se sont proposé de combattre la vie chère ».

A l’instar de ses consœurs, Lucie Delarue-Mardrus contribua à cet ouvrage en donnant une de ses recettes. Celle-ci, écrite en vers, s’avère la plus facile et la plus brève de tout le livre ; elle illustre par la même occasion l’étendue de ses talents culinaires :

Je ne sais cuire que les œufs

Et surtout s’ils sont à la coque,

Je les mets dans l’eau, puis m’en moque,

Et s’ils sont durs, eh bien ! Tant mieux[4].

Elle donne, toujours sur ce même ton humoristique, Le Rappel des « Belles Perdrix » qui fait suite à la présentation de René Fauchois.

 

N’écoutons pas les journalistes

Qui racontent dans leurs canards

Que les « Belles Perdrix » sont tristes,

Car ce ne sont que des bobards.

 

Ces romancières fatiguées

Se reposent par des chansons.

Quoique perdrix, elles sont gaies,

Sachons-le, comme des pinsons.

 

Mes sœurs, ouvrons nos ailes !

Le bon rire coule à pleins bords,

La compagnie rappelle

Qu’on est bien sans le sexe fort !

 

Les vins sont fins, la chère est bonne,

Oublions les vilains museaux,

Les perdrix rient quand on leur donne

Différents petits noms d’oiseaux.

 

Vexés de n’être pas à table,

Êcoutez-les, ces sacripants !

Ils nous disent (s’ils sont aimables)

Orgueilleuses comme des paons.

 

Mais nous ne sommes pas chipies,

Laissons donc parler ces messieurs,

Même s’ils nous jugent entre eux

Aussi bavardes que des pies.

 

Peu nous importent leurs discours,

Voire si nos honnêtes joies

Leur font penser, à ces balourds,

« Ce sont des dindes… ou des oies. »

 

 

Mes sœurs, ouvrons nos ailes !

Le bon rire coule à pleins bords,

La compagnie rappelle

Qu’on est bien sans le sexe fort !

 

Mais voici leurs fureurs accrues,

J’entends leur murmure d’ici :

Ils prétendent cette fois-ci,

Que nous sommes des grues.

 

Messieurs, vous allez un peu fort !

Lorsque l’heure des toasts arrive,

Tout au plus sommes-nous des grives,

J’affirme que vous avez tort.

 

Une par une ou bien ensemble

Quand nous chantons en si bémol

On dirait plutôt, il me semble,

Que nous sommes des rossignols.

 

Allez ! vous pouvez à votre aise

Viser notre cercle choisi.

Nous savons, ne vous en déplaise,

Nous garder des coups de fusil.

 

Perdrix, pinson, paon, grive, grue,

Pie, oie, dinde ou rossignol fou,

Non, foi de Lucie Delarue

Vous ne nous mettrez pas aux choux !

 

Mes sœurs, ouvrons nos ailes !

Le bon rire coule à pleins bords,

La compagnie rappelle

Qu’on est bien sans le sexe fort !

Lucie Delarue-Mardrus, 25 avril 1929, Paris[5].

 

Ce club gastronomique s’est également fait connaître comme mécène ; celui-ci fonde, vers 1928, le « Prix des Muses ». Une généreuse donatrice, qui ne sera jamais autrement désignée que comme Mme S., a doté le club d’une somme de 25000 francs qui permet de récompenser un artiste peintre (15000 francs) et un littérateur (10000 francs). Ainsi en 1930, c’est le peintre Chamson qui est récompensé pour l’ensemble de son œuvre picturale.

                   

Cette initiative ne survécut pas à la Seconde Guerre mondiale et ne paraît pas avoir non plus suscité de regain d’intérêt quand la France renoua avec la prospérité… Nous ne saurons pas non plus quelles rencontres fit Lucie Delarue-Mardrus ni quel intérêt elle retira de ces festins mensuels.

 

 

Dr. Nelly Sanchez (août 2011)

[1] Blanche Vogt, « Un club de gourmandes », Lectures pour tous, juin 1930.

[2] Gaston Derys, « Les femmes sont-elles des gourmettes ? », La Femme de France, 10 juin 1928, p. 22.

[3] Ibid.

[4] Lucie Delarue-Mardrus, Les Recettes des Belles Perdrix, Albin Michel, 1930, p. 34.

[5] Ibid., p. 19-21.  

 

 

Parmi les ouvrages les plus méconnus de Lucie Delarue-Mardrus se compte Aurel et le procès des mondaines paru en 1921 chez Povolasky, Paris. Cet ouvrage reprend la conférence que l’auteure fit le 29 avril 1921 au Théâtre de la Renaissance. Parce qu’Aurel, pseudonyme de Aurélie Octavie Gabrielle de Faucamberge (1881 ?- 1948), est aujourd’hui tombée dans l’anonymat, on oublie qu’elle fut une proche de Lucie Delarue-Mardrus. Nous avons ici rassemblé quelques articles consacrés à cette femme de lettres dont les titres, par leur conception trop novatrice de la Femme et du Couple ainsi que par le manque de clarté de l’écriture, provoquèrent plus souvent les railleries du public que sa sympathie.

Les Cahiers Léautaud n°25 (janvier/juin 1999) offrent deux études. « Aurel, une femme de lettres » d’Estelle Guillaume, est une rapide biographie mettant l’accent sur le rôle que joua celle-ci dans la promotion des jeunes écrivains. « Aurel, l’oie de Léautaud » de Patrick Berthelot ; le titre ne surprend plus quand on sait que Paul Léautaud avait ainsi nommé un volatile de sa basse-cour. Ne manquant jamais une occasion de la tourner en dérision, il fut certainement le contemporain qui lui consacra le plus de lignes… lesquelles sont parmi les plus savoureuses de son Journal.

La Corne de Brume n°5 (octobre 2008), revue du C.R.A.M (Centre de réflexion sur les auteurs méconnus), donne à lire « 1948-2008. Hommage à Madame Aurel pour l’anniversaire des 60 ans de sa disparition ». Ce dossier, réalisé par Laurent François, contient des extraits du « Journal » inédit d’Aurel où l’on rencontre Lucie Delarue-Mardrus, Max Jacob… Nous pénétrons dans l’intimité de celle qui survécut à sa fille et à ses deux maris : le peintre Cyrille Besset (1861-1902) et le littérateur Alfred Mortier (1865-1937).

 

Nelly Sanchez

 

 

La Garçonne et l’assassin. Histoire de Louise et de Paul, déserteur travesti, dans le Paris des années folles par Fabrice Virgili et Danièle Voldman, Payot, 2011. 16 euros.

 

Pour ceux qui aiment les histoires dans l’Histoire, pour les amateurs de faits divers… Ceci est une histoire vraie. Cet ouvrage, fort bien documenté et illustré, relate le parcours d’un couple de parisiens modestes que les évènements vont propulser sous les feux de l’actualité. Fabrice Virgili et Danièle Voldman se sont apppliqués à retracer l’existence de Louise Landy et de Paul Grappe afin de tenter de comprendre leurs actes, leur choix.

Paul déserta l’armée pendant la Grande Guerre et se cacha en devenant la « jolie Suzy »… Ainsi travesti, il prit goût à cette existence, entraînant à sa suite son épouse. Celle-ci mettra fin à cette déchéance en abattant Paul. Mais les faits sont loin d’être aussi clairs : les auteurs de ce récit, très bien écrit, soulèvent des questions fort intéressantes quant à la personnalité des protagonistes.

Dans les années 1930, le procès de Louise passionna le Tout-Paris et on pourrait trouver un écho de cette affaire dans les écrits de Colette qui mit en scène un couple présentant de curieuses similitudes avec Louise et Paul dans sa nouvelle Bella-Vista, parue en 1937… A noter que Lucie Delarue-Mardrus fut le seul journaliste femme à avoir été admise lors du procès de Louise. 

Nelly Sanchez

 

 

 

 

Geneviève Lefort, L’Éducation des mères. Olympe Gevin-Cassal, inspectrice générale de l’enfance (1859-1945), Presses Universitaires de Rennes, « Archives du féminisme », 2011. Préfacé par Linda Clark.

18 euros, 289 pages

 

Voici un destin atypique comme a su en fabriquer la société en pleine mutation de la fin du 19e siècle. Petite-fille d’Olympe Gevin-Cassal, l’auteure relate comment, pour sauver de la misère son époux et ses quatre enfants, cette femme d’origine alsacienne mena de front une carrière de femme de lettres et d’inspectrice générale du Ministère de l’Intérieur. Au récit biographique se mêle la réalité d’une époque que la dénatalité de la France inquiète mais qui se montre frileuse quant aux mesures à prendre.

Sa connaissance des milieux défavorisés, des filles mères dont le personnage inspira de nombreux romanciers, des orphelins, lui inspira de nombreux articles que publièrent des revues comme La Fronde, La Revue bleue, Le Signal de Genève… Sans fard, elle décrit le quotidien de ces femmes qui, faute de moyens, doivent travailler jusqu’au terme de leur grossesse, elle fait connaître tous les aspects de la misère (mendicité, prostitution). Elle dénonce aussi les faiblesses du système d’aide mis en place, les abus des sociétés dites « philanthropiques »… Féministe, elle œuvra jusqu’à la fin de sa vie pour l’amélioration des conditions d’hygiène dans les hôpitaux, les maternités et pour réhabiliter les mères célibataires.

Amie de Nadar père, de Léon Daudet, de Judith Gautier, elle sut émouvoir l’opinion et les sphères politiques, contribuant ainsi à initier les réformes de tout un système social, sanitaire et éducatif obsolète. Parallèlement à ce travail de militante, elle publia des livres pour enfants, inspirés des faits et gestes des siens…

 

Nelly Sanchez

 

 

 

Les Dames de Femina. Un féminisme mystifié

Colette Cosnier, 2009, Presse Universitaires de Rennes, « Archives du féminisme », 308 p.

 

Voici une réflexion fort agréable à lire sur un des plus célèbres magazines féminins de la Belle Epoque. Malgré sa réputation de périodique moderniste et féministe, ce titre qui parut entre 1901 et 1914 n’est pas aussi révolutionnaire qu’il le prétend… Si l’on y évoque les mœurs féminines des autres pays, les suffragettes anglaises, les américaines et leur pragmatisme qui peuplèrent nombre de romans fin-de-siècle ainsi que les pionnières –bachelières, avocates, médecins, aviatrices...etc-, on en cultive pas moins les solides valeurs conjugales et familiales.

A signaler un cliché peu connu de Lucie Delarue-Mardrus qui illustre ses Impressions de vacances en Normandie (Femina du 15 août 1910).

 

Nelly Sanchez

 

 

 

 

Dans un article sociologique intitulé "De la sociocritique à l'argumentation dans le discours", (Littératures, n°140, décembre 2005, pp. 56-71) Ruth AMOSSY parle du roman de Lucie Delarue-Mardrus Un roman civil en 1914,  s'interroge sur la légitimité d'un roman de guerre féminin et analyse finement et longuement son dispositif d'énonciation.

Patricia Izquierdo (merci à Valérie) 22-01-09

 

 

 

Dédicacée à Lucie

 

Dans le recueil de nouvelles intitulé Un Drame de famille, de Marcelle Tinayre, se trouve un court récit dédicacé à Lucie Delarue-Mardrus. Il s’agit de La Fleur en laine, petite histoire qui retrace le destin d’une fleur brodée en 1845 qui finira sur le chapeau d’une élégante des Années 20.

Chaque nouvelle de ce recueil a un dédicataire, souvent un proche de la romancière… Il serait intéressant de voir quelles étaient les relations qu’entretenaient Marcelle Tinayre et Lucie Delarue-Mardrus lorsque parut ce Drame de famille en 1925.

Nelly Sanchez