Lettre d'informations d'avril 2010

DES NOUVELLES DE L’ASSOCIATION DES

AMIS DE LUCIE DELARUE-MARDRUS…

Lettre d’informations n°2

Avril 2010

 

 

   Voici la deuxième lettre d’informations de l’association des Amis de Lucie Delarue-Mardrus. Elle sera transmise aux personnes présentes lors de l’assemblée générale à Honfleur le samedi 17 avril 2010, vous parviendra  électroniquement si vous n’avez pu venir et sera envoyée par la poste à nos adhérents non internautes. Elle sera également disponible sur notre site http://www.amisldm.org sous l’onglet « Vie de l’association ». Son contenu doit évoluer, toute suggestion est bienvenue (création de rubriques, amélioration de la mise en page). Si certains veulent participer ou même créer la prochaine lettre, j’en serais très heureuse.

 

   Voici les points abordés présentement:

 

p.2 : Retour sur le colloque « Genre, Arts, Société : 1900-1945 »

p.3 : Projet d’un cahier annuel pour 2011

p.4 : Parution : MA BLONDE Lettres de Lucie Delarue-Mardrus à Natalie Barney (et à Ernest Prévost), Venise, L’Amazone retrouvée, février 2010.

p.5 : Organisation d’un événement festif à Honfleur fin 2010

p.6 : Découverte d’extraits de l’œuvre de Lucie Delarue-Mardrus : Honfleur

Ø      Retour sur le colloque « Genre, Arts, Société : 1900-1945 »

 

   Cette affiche est née d’un collage d’Isabelle Clément, membre de l’Association des Amis de Lucie Delarue-Mardrus. Un grand merci pour cette réussite maintes fois plébiscitée. Merci également à Corinne Maillot, infographiste, qui a contribué à transformer ce superbe collage en affiche.

 

 

   Ce colloque a été une véritable réussite. Les deux journées se sont déroulées sans anicroche et le programme déjà prometteur s’est révélé passionnant. Nous avions retenu 18 communications sur les 50 propositions en privilégiant les adhérents de l’Association des Amis de Lucie Delarue-Mardrus, principale organisatrice avec l’Université Paris 8 dont je tiens à souligner la grande générosité et le Barnard College que je remercie chaleureusement. Nos remerciements  vont en particulier à Brunhilde Biebuyck, directrice de Columbia, Anouk Allart, sa fille, Genevieve Acker, présidente de l'association des Anciennes élèves de BARNARD COLLEGE, et Peter Connor, chef du département de Français de BARNARD. Grâce à Anne-Marie van Bockstaele que je remercie vivement car elle s’est énormément investie dans l’organisation de ce colloque, nous avons pu nous installer deux jours durant à Reid Hall, lieu magnifique au cœur de Paris. Nos plus chaleureux remerciements également  à Anne Emmanuelle Berger, professeur adjoint de littérature française à l’Université de Cornell aux Etats-Unis et à Paris 8, où elle dirige la formation doctorale du centre d’études féminines et d’études de genre, qui a ouvert magistralement notre réflexion le vendredi matin.

 

   Les communications retenues ont permis d’aborder la problématique de la création féminine de 1900 à 1945 dans différents arts : littérature, cinéma, peinture, dessin, photographie et sculpture. Nous avons parlé notamment d’Yvonne Serruys, Unica Zürn, Claude Cahun, Elisabeth de Gramont, Judith Gautier et Sarah Bernhardt, Valentine de Saint-Point.

   Une demi-journée a été consacrée à Lucie Delarue-Mardrus, le samedi matin, avec quatre communications passionnantes et de grande qualité que j’aimerais déjà, avec l’accord des auteurs (Nelly Sanchez, Anne-Marie van Bockstaele, Patrick Dubuis et Mélanie Collado), mettre en ligne sur le site http://www.amisldm.org. Toutes concernaient les romans de Lucie Delarue-Mardrus. Les deux communications suivantes parlaient de deux contemporaines, Marguerite Burnat-Provins et Jehanne d’Orliac qui correspondit avec Lucie Delarue-Mardrus. Joëlle Garcia, nouvelle adhérente à notre association, m’a donné copie de certaines de ces lettres.

   Le récital du vendredi soir avec la soprane Virginie Lefebvre, accompagnée au piano par Isabelle Aubert, sur des compositions de Lucie Delarue-Mardrus, Debussy, Poulenc, Jeanne Leleu et Lili Boulanger, et des textes de Lucie Delarue-Mardrus, Verlaine, Louise de Vilmorin, Gabriel Vicaire et Francis Jammes, a été une vraie réussite. Ensuite, Kay Bourgine, ancienne élève du Barnard College, accompagnée au piano par Jean-Baptiste Artigaz, a chanté avec talent ses propres compositions et quelques standards de choix. Saadia Maani a lu des poèmes de Renée Vivien et Lucie Delarue-Mardrus.

   Les Actes seront publiés le plus rapidement possible. Des demandes de subvention sont en cours. La publication papier est une priorité mais tout dépend de nos moyens. Elle sera au moins électronique sur notre site. A suivre…

   Cette expérience exceptionnelle a offert une dimension internationale à notre association puisque les intervenants (de France, Suisse, du Canada et des Etats-Unis) et les auditeurs (60 et 70 le vendredi et encore 40 le samedi) venaient de différents pays.

   Merci également aux Editions de la Lieutenance et à la Société des Amis d’Axieros pour leur soutien financier bienvenu.

 

Ø      Projet de publication d’un cahier annuel

 

   Comme nous l’avions précisé dans la dernière lettre d’informations de septembre 2009, nous projetons de publier un cahier annuel de l’Association des Amis de Lucie Delarue-Mardrus. Le premier paraitra vraisemblablement en 2011 et sera gratuit pour les adhérents. Ce projet pourrait rencontrer et concrétiser une autre idée proposée en septembre 2009, celle d’une thématique annuelle née de l’œuvre même de Lucie Delarue-Mardrus (Honfleur, l’Afrique du Nord...), qui dynamiserait à la fois le site et permettrait de fédérer des contributions, des extraits d’œuvre et des inédits, des photographies, et les coups de cœur des participants.

   Il est indispensable dans cet objectif de constituer rapidement un comité de rédaction et un comité de lecture de même qu’un comité de pilotage qui se chargera du financement et de la diffusion de ce premier numéro. Avis aux volontaires.

 

Ø      Parution :

 

MA BLONDE Lettres de Lucie Delarue-Mardrus à Natalie Barney (et à Ernest Prévost), Venise, L’Amazone retrouvée, février 2010.

 

   Vient de paraitre en février 2010 dans une superbe édition "L'Amazone retrouvée" (Venise) un florilège de lettres de Lucie Delarue-Mardrus adressées à Natalie Barney, de 1902 à 1942.

   Nous devons ce formidable travail à la pugnacité de Francesco Rapazzini, journaliste, romancier et chercheur, membre de notre association et auteur d'une biographie remarquable d'Elisabeth de Gramont (Elisabeth de Gramont avant-gardiste, Fayard, 2004), et à Chantal Bigot, libraire d'exception qui a créé "Les Amazones", spécialisée dans les écrits (de et sur les femmes) et l'histoire des femmes (voir http://www.galaxidion.com/amazones/). 

   Cette publication à tirage limité (100 exemplaires) de très belle facture (et un papier de grande qualité) présente de nombreuses illustrations issues de collections particulières, dont "La main de Lucie Delarue-Mardrus, dessinée par Marcelle Routier en 1937 et signée par Lucie", et de belles photographies de Lucie Delarue-Mardrus en 1904 (pp. 64, 121, 127, 149 et 180), 1909 (pp. 169 et 175), 1913 (p. 218), en 1934 lorsqu'elle présidait le prix Femina aux côtés de Julia Daudet, Yvonne Sarcey et Marcelle Tinayre (p. 223), et en 1937, p. 266. Nous pouvons admirer aussi  le tableau d'Aman-Jean de 1910, p. 213, et des fac simile de manuscrits où l'on remarque son élégante graphie. Sans oublier les deux photographies où Lucie Delarue-Mardrus et Natalie Barney apparaissent côte à côte, de dos malheureusement, en 1902 (p. 67) à Neuilly, dans le jardin, et en 1903, sur les quais de la Seine (p. 111). 

   Une préface et des notes éclairantes de Francesco Rapazzini complètent ce recueil émouvant que j'ai dévoré d'un trait. Quels destins fabuleux… Nous les suivons pendant quarante ans, deux guerres, plusieurs déchirements, au gré des vicissitudes de leurs vies publiques et privées.

   C'est d'abord bien sûr leur liaison tumultueuse, tempétueuse, de 1902 à 1903, avec des lettres sensuelles et exigeantes qui montrent à la fois l'intransigeance de Lucie Delarue-Mardrus et l'inadéquation de leur caractère, puis une amitié, elle-même ombrageuse et inégale mais qui perdure néanmoins, par delà les déménagements successifs de Lucie (jusqu'à Château-Gontier), la deuxième guerre mondiale qui les sépare, et les nombreuses conquêtes de Natalie.

   Ces traces de vie  touchent par leur authenticité et leur simplicité. Sans fard, Lucie Delarue-Mardrus évoque sa vie, ses difficultés matérielles auxquelles la généreuse Natalie remédie bien souvent, et ses problèmes de santé (son "rhumatisme articulaire et déformant", p. 217) qui vont s'aggravant. Elle masque toutefois la rudesse de sa vie avec Germaine de Castro qui devient une véritable sainte. Par pudeur sans doute.

   Les aléas de sa renommée littéraire déclinante apparaissent également en toute transparence.  Le refus récurrent de ses romans, de ses nouvelles et de ses poèmes, de ses articles aussi, n'entame pas son besoin d'écrire, malgré la douleur physique. Son infatigable créativité affleure souvent. Ce florilège permet de découvrir de nombreux poèmes inédits, des lettres en Anglais aussi et quelques mots et expressions Arabes dont elle aimait parsemer ses lettres. Toutes particularités que nous retrouvons fréquemment dans ses cahiers intimes contemporains inédits. 

   La majorité de ses lettres provient du fonds Natalie Clifford Barney de la Bibliothèque Littéraire Jacques Doucet à Paris.

   Suivent, en Annexe, des lettres adressées à Ernest Prévost et qui appartiennent à la collection de Francesco Rapazzini. Cet homme célèbre en son temps, poète proche notamment de Coppée, Sully-Prudhomme, Richepin et du Honfleurais Henri de Régnier, apparaît comme un bienfaiteur car il permit à Lucie Delarue-Mardrus, en tant que Président de la Société des Poètes, d'obtenir en mai 1941 une "indemnité littéraire" de 6000 francs par an lorsqu'elle était démunie. Naquit entre eux une amitié de 1941 à la mort de Lucie Delarue-Mardrus (plus exactement cinq mois auparavant, en novembre 1944). 

   Saluons ce superbe travail qui fait date déjà et dont il y aurait tant à dire encore... 

   C'est un cadeau de luxe à se procurer de toute urgence...

 

Ø      Organisation d’un événement festif à Honfleur fin 2010

 

   Nous projetons d’organiser un événement culturel autour de Lucie Delarue-Mardrus pour promouvoir son œuvre plastique par exemple. Nous avons également pensé à la projection d’un film adapté d’un des ses romans, Le diable au cœur, Chair ardente ou Graine au vent.

   Il est trop tard pour nous associer au festival Normandie Impressionniste (voir le site http://www.normandieimpressionniste.com) qui se déroule cet été dans toute la Normandie, à moins que nous parvenions à placer quelques toiles ou dessins de Lucie Delarue-Mardrus dans l’exposition des peintres Honfleurais qui se tiendra au Grenier à sel. Il aurait fallu remplir un dossier de candidature pour le mois de juin dernier et j’ignorais jusqu’à l’existence de la première édition de ce festival.

   En revanche, Jacques Sylvain Klein que j’ai contacté, l’un des commissaires de ce Festival de grande envergure, nous encourage à proposer un projet pour le prochain festival dans 3 ou 4 ans, la date n’est pas encore fixée. Ce Rouennais connait Lucie Delarue-Mardrus et veut nous aider à promouvoir son œuvre. Cela nous laisse le temps de construire un projet d’envergure, d’obtenir des subventions, pour commémorer soit les 70 ans de sa mort (2015), soit les 140 ans de son année de naissance (2014), à Honfleur principalement, et peut-être aussi Château-Gontier.

 

 

Ø      Découverte d’extraits de l’œuvre poétique de Lucie Delarue-Mardrus : Honfleur

 

  La Normandie tient une grande place dans l’œuvre de Lucie Delarue-Mardrus qui  parlait très bien le patois normand[1] et l’emploie volontiers pour décrire le monde des marins et des paysans normands dans ses romans (l’Ex-voto, Graine au vent, L’Apparition, elle en parle également dans L’amour à la mer, Lemerre, 1931). Dans Occident (dès 1901), elle décrit fréquemment des pérégrinations au gré des saisons (« J’aime cheminer par mes prés normands », p. 28). Elle parle de sa passion de la mer (également dans Par vents et marées en 1910 et dans La figure de proue en 1908 au retour de ses voyages d’Afrique) : « Je te salue, ô mer » (p. 47) ou encore « Je suis la hanteuse des mers fatales » (p. 57). Dans Ferveur (p. 95), en 1902 elle avait publié son poème le plus connu : « L’odeur de mon pays était dans une pomme ».

      La Normandie, c’est pour elle  « chez nous » qui désigne à la fois la maison, le foyer (Horizon, p. 12), le village, et la région, surtout lorsque ses proches s’éteignent (Par vents et marées, voir toute la section « Chez nous », pp. 149-229). Nous avons déjà cité « Soir d’Honfleur » (Par vents et marées, Fasquelle, 1910, p. 43) dans la lettre de septembre 2009.

   Voici un florilège de poèmes consacrés exclusivement à Honfleur puisés dans différents recueils qui montrent bien la permanence de cet amour.

 

Un chant de retour                                             (in La figure de proue, Fasquelle, 1908, p. 242, de retour d’Afrique…)

 

Honfleur, ma ville de naissance

Que j’aime plus que de raison,

Je te reviens de l’horizon

Ayant mené loin mon enfance.

 

Je t’avais dans l’âme et la chair,

Et si j’ai quitté ta jetée,

Ce n’est qu’à tout jamais hantée

Par ta grisaille sur la mer.

 

Ailleurs, il fait parfois bon vivre,

Mais toujours, ville des prés verts,

On est un peu ton marin ivre

Qui tangue à travers l’univers.

 

Qui sait quels calmes, quelles rages

On a vu loin de toi, Honfleur ?

Quels continents couleur de fleur,

Et qui sait même quels naufrages ?

 

Nul ne saura jamais jusqu’où

On a pu conduire sa barque.

Mais vois-tu quand on naît monarque,

Monarque on reste jusqu’au bout.

 

 

Honfleur             (in Souffles de tempête, Bibl. Charpentier, 1918, p. 25)

 

L’ombre d’un grand nuage est sur l’eau comme une île.

L’estuaire est plus beau qu’aucune fiction.

      La vieille navigation

     Bat des ailes parmi la ville.

 

Après les toits salés commence le grand foin,

Et les fermes sont là dans le bleu des herbages.

    L’odeur des pommes vient de loin

    Se joindre au goudron des cordages.

 

Je n’ai pas vu la fin de mes ravissements,

Honfleur tout en ardoise où pourtant je suis née,

   O ville riche d’éléments,

   Nombreuse, bien assaisonnée.

 

Sont-ce les toits vieillots qui se pressent si fort,

Ta petite marine et ta campagne verte

   Que je chéris, ou bien ton port

   Qui te fait toujours entr’ouverte ?

 

Rien que de bon, de pur, pour cette ville-ci !

Moi qui suis pour jamais vouée à la chimère,

   Je l’aime simplement, ainsi

   Qu’on aime son père et sa mère.

 

At Home                       (in Les sept douleurs d’octobre, Ferenczi, 1930, p. 93)

Voici les cinq belles fenêtres

Du salon vieillot où je vis

En pleine herbage, loin des êtres,

Haut, comme au temps des ponts-levis.

 

Dans la première est la vallée,

Dans l’autre la ville bleu noir,

Deux autres ont un bout d’allée

Et l’estuaire où meurt le soir.

 

Mais, dans le tragique cinquième,

Plein les seize petits carreaux,

Il n’est rien qu’un grand vide blême

Au dessus d’espaces ruraux.

 

Ces éléments frôlent mes vitres,

Ils se mêlent au mobilier,

Et, sur un mode familier

Déroulent leurs vastes chapitres.

 

Je vois à travers l’infini

Monter le monde des nuages,

La formation des orages

Ou le beau temps bleu dans son nid.

 

Et parfois, relevant la tête

Au coin de mon âtre embrasé,

Je vois accourir la tempête

Ainsi qu’un monstre apprivoisé.

 

Chaise longue (inédit publié dans le Choix de poèmes Paris Alphonse Lemerre 1951)

 

Je ne sais si je dors, mais je sais que je rêve.

Ma ville est à mes pieds, et l’estuaire bleu.

D’ici, rien n’a changé. Je me retrouve un peu

Dans mon enfance longue et ma jeunesse brève.

 

D’ici, je n’entends pas bourdonner les moteurs

Dans les barques, non plus les nouvelles musiques

Dans les maisons en proie aux jouets mécaniques.

Je n’entends que la cloche, ou crier les vapeurs.

 

Je ne descendrai plus dans ma vile, investie

Par l’esprit d’aujourd’hui brutal et décevant.

Je resterai chez moi, douloureux ci-devant,

Dans l’odeur du passé, pas encore partie.

 

                                            

 

Coordonnées de l’Association des Amis de Lucie Delarue-Mardrus

Siège social :

Association des Amis de Lucie Delarue-Mardrus

c/o Patricia Izquierdo

27 rue Principale

57420 Pontoy

Adresse électronique : assoldm@yahoo.fr

Adresse du site Internet : http://www.amisldm.org

 

 

 



[1]  Myriam Harry : Mon amie Lucie Delarus-Mardrus Ariane, 1946, pp. 42-43 : « Que de rires quand elle parlait le patois normand, avec ses expressions saisissantes et ses ‘grandiosités surannées’ ». Son roman Ex voto (Fasquelle, 1922) fut unanimement reconnu comme une reproduction vivante du parler normand (Hélène Plat : Mon amie Lucie Delarus-Mardrus, p. 184).